vendredi 23 octobre 2009

PS - travail : retour sur une fin de semaine contrastée


Retour sur la fin de semaine dernière. La question du travail et des conditions de travail des salariés y ont été au coeur des échanges auxquels j’ai pu, comme militant socialiste, prendre part. J’y ai contribué. J’en retire une impression contrastée.

Travail, conditions de travail et salariés au coeur de la réflexion des socialistes, donc. Vendredi soir, à Vincennes, c’était l’AG mensuelle de notre section locale. Parmi les points à l’ordre du jour j’avais demandé, relayant les demandes de nombreux de nos camarades (notamment de “L’Espoir à Gauche”), que l’on prenne le temps de prendre à bras le corps ce sujet. Parce qu’il est d’une actualité criante, qui, vis-à-vis de nos concitoyens, nous interdit de regarder ailleurs. Plus profondément, parce qu’il est au coeur de ce qui fait notre engagement commun, à nous socialistes. Histoire de notre pensée politique, sensibilité partagée face à ce dont est tissé le quotidien de nos semblables : notre responsabilité singulière est évidente. Au programme, du coup : un débat sur “la souffrance au travail”.
Samedi matin, ceux qui souhaitaient compléter et prolonger cette réflexion pouvaient se rendre à la journée de travail organisée par le PS à “La Bellevilloise”. Une journée intitulée : “Au travail pour l’emploi !” À la différence d’autres journées de travail (comme celle du printemps dernier consacrée aux PME qui à part quelques invités rassemblait exclusivement des socialistes), celle-ci s’annonçait comme une “journée de débat et de propositions avec l’ensemble des partis de gauche et des syndicats”. Pour être honnête, je n’ai pu être présent que le matin.
Le week-end a donc commencé pour moi par une promenade sportive du côté de Ménilmontant, avant d’enchaîner sur le discours inaugural de Harlem Désir, puis la table ronde “Comment protéger les salariés victimes de la crise ? Quels changements pour demain ?”, animée par Alain Vidalies (secrétaire national du PS à l’emploi et au travail). (Intervenants : Alain Vidalies, Thierry Lepaon membre de la commission exécutive de la CGT, Dominique Corona secrétaire national à la formation syndicale UNSA, Marcel Grignard secrétaire général adjoint CFDT, Pascale Gérard secrétaire nationale PS à la formation professionnelle et à la sécurité sociale professionnelle).

Au cours de ces deux moments de travail, j’ai entendu beaucoup de choses intéressantes. Certaines que j’avais déjà entendues, d’autres avec lesquelles j’étais d’accord, d’autres vis-à-vis desquelles j’avais des réserves (y compris à l’occasion parce que je ne les comprenais pas !). Au total, les échanges ne m’ont pas paru manquer de consistance. Ni de sincérité, ce qui sur un tel thème est déjà, d'une certaine façon, un signe de bonne santé pour le PS.
Pourtant, je l’ai dit, comme militant j’ai retiré de cette fin de semaine une impression mitigée. Plaisir de voir ma famille politique retrouver les chemins d’une de ses missions premières : penser un progrès qui se décline aussi dans le quotidien des travailleurs. Plaisir aussi de voir, dans le travail de réflexion mené pour cela, se négocier un tournant nécessaire et qu’avec d’autres j’appelais il y a quelque temps maintenant dans mon travail Pour une politique du pouvoir-vivre : celui qui consiste à rechercher le progrès non seulement dans les “conditions de travail” (temps de travail, conditions de rémunaration, etc., autrement dit le cadre à l’intérieur duquel les salariés exercent leur activité), mais aussi dans le contenu du travail lui-même (ce qui se fait et ce qui se passe sur le lieu de travail, durant une journée de travail, en termes de tâches, de relations de chacun avec son environnement, etc.).
Plaisir donc, mais aussi frustration. Dans le même temps où il annonce le rassemblement, l’appareil du PS, il faut le reconnaître, peine encore à mobiliser ses propres “troupes”. C'est-à-dire les militants. Or la “renaissance” (nécessaire et urgente) du Parti socialiste passe aussi par là.
De même, cette “renaissance” exige de faire émerger, sinon déjà de nouvelles idées, du moins des perspectives inédites. Comme autant de sillons où des idées nouvelles trouveraient, pour germer, un terreau propice. Cela ne s’est pas produit samedi. J’ai entendu beaucoup de choses intéressantes. Beaucoup de choses que j’avais entendues déjà en juin dernier. Je suis reparti (certes avant la fin) avec trop peu de pistes de travail nouvelles, à mon avis parce qu’il y a eu trop peu de débat. Trop peu de passion, aussi.
Pourquoi ? Mon sentiment : les interlocuteurs se connaissaient trop. Ils se sont trop habitués les uns aux autres. Et en même temps, on le sent bien, une partie d’entre eux se jaugent, à l’approche d’un rendez-vous électoral - les élections régionales - qui sera le premier à la veille duquel tout le monde aura conscience des transformations profondes qui travaillent actuellement le paysage politique français - et avaient déjà commencé à le travailler durant la campagne des élections européennes. Chacun s’apprête à “se compter”. Résultat : tous sont réunis dans une même salle, mais sur le plan des idées chacun reste dans son orbite traditionnelle, égrenant sans surprise analyses et propositions déjà formulées - pas encore essayées, par la force des choses. On sait quelle importance revêt pour moi la capacité du PS à agir avec ces partenaires historiques et naturels que sont les autres formations de gauche et les syndicats. Mais comment, dans ces conditions, attendre la passion que peut seul faire sourdre dans le débat le sentiment que, en France, un changement de rapport de forces politique est imminent - et donc, qu’à travers les analyses et propositions confrontées c’est demain que nous créons ?

Décidément, il s’avère désormais difficile de séparer audace dans les “partenariats de réflexion” (dans les lieux et les moments consacrés au travail sur le fond), et efficacité pour mettre au jour les chemins d’un projet politique nouveau et potentiellement majoritaire en France !
De l’audace dans les “partenariats de réflexion”, qu’est-ce à dire ? Notamment deux choses : oser prolonger le dialogue engagé cet été, à Marseille, avec non seulement Daniel Cohn-Bendit et Robert Hue, mais aussi Marielle de Sarnez. Cette dernière ne représentait pas tant le Modem - pas plus que Robert Hue le Parti communiste -, qu’elle n’exprimait une sensibilité politique et des aspirations ? Tant mieux. C’est la garantie d’une liberté, d’une énergie plus grandes dans les échanges, sans risque de sceller à la légère quelque alliance que ce soit. Et cela permet d’éviter de tout confondre, travail de fond et “stratégies d’alliance” à la veille d’une élection.
L’audace, c’est aussi nourrir notre travail d’échanges suivis et francs avec... les Français. Le “tour de France” entamé par Martine Aubry va, de ce point de vue, dans le bon sens. Mais on peut s’interroger sur sa portée et sur l’ampleur de son apport à la vigoureuse mobilisation intellectuelle qui s’impose au PS, si cette démarche de la Première secrétaire devait ne pas être relayée, localement, par sections et fédérations. Pour agir dans ce domaine, pour oser “sortir de nous-mêmes”, la campagne des élections régionales va nous ouvrir un espace. Notre bilan - qui en Ile-de-France, comme ailleurs, est bon - doit servir non seulement d’argument de campagne, mais surtout de point d’appui pour aller avec confiance au-devant de nos partenaires logiques dans l’espace public... à commencer par nos concitoyens ! Oser s’impose, et d’urgence, car ainsi que le souligne Pierre Moscovici dans son dernier ouvrage, “le compte à rebours pour 2012 est déjà entamé” !


vendredi 16 octobre 2009

Jeunes et règle républicaine: une rencontre fondatrice sacrifiée par l’exécutif


Hier soir, au cinéma “Le Vincennes”, le collectif RESF Vincennes - Saint-Mandé organisait une projection-débat autour du documentaire “Sans papier ni crayon”, de Marie Borelli. Ont suivi des échanges intéressants, animés par trois intervenants : Miguel Benassayag (psychanaliste et philosophe), Yoram Mouchenik (psychologue-psychotérapeute et anthropologue), et Emmanuel Terray (philosophe).

Les réflexions ont tourné notamment autour de deux questions :
- quelle signification et quelle portée le traitement fait aujourd’hui à ces enfants scolarisés de parents sans-papiers, a-t-il pour la société française ?
- doit-on renoncer à toute idée de "règle" dans ce domaine ?



J’ai eu la chance de pouvoir prendre part au débat (et de remercier le collectif pour cette soirée et les pistes de réflexion qu’elle a pu contribuer à ouvrir). Pour moi, la réflexion sur ce sujet doit impérativement faire une place centrale à la notion de "règle", qu'on ne peut pas évacuer sous peine de fausser le débat.
Cela posé, le traitement fait aujourd’hui aux enfants de sans-papiers sur le territoire français
a, me semble-t-il, une portée profonde et une grave signification pour la société française et le pouvoir qui la gouverne.
Pour résumer, il révèle, de la part de l’exécutif, un choix politique global : celui de sacrifier la rencontre entre futurs (ou jeunes) citoyens et éthique républicaine - pilier d'un modèle durable de “vivre-ensemble”. Il révèle aussi, de la part de responsables politiques locaux complaisants, le choix d’encourager cette politique.

De cela, l’actualité témoigne. Par exemple avec la suppression annoncée et brutalement amenée, à l'initiative de l'exécutif, d'une importante institution de la République : la Défenseure des enfants, chargée de veiller au respect sur le territoire français de la Convention internationale des les droits de l’enfant (signée par la France en 1989). Une suppression qui intervient au moment même où l’on s’apprête à célébrer les vingt ans de cette convention... et où la Russie elle-même se dote d’un Défenseur des enfants. C'est fouler aux pieds une institution qui, j'en ai été le témoin direct, contribue à les initier les jeunes à la règle et aux pratiques républicaines (voir mon post du 19 juin dernier).

Plus généralement l’exécutif, au travers de messages contradictoires, fragilise la crédibilité - et même la réalité - que la règle républicaine peut avoir aux yeux des jeunes français.
Saluant la main sur le coeur la naissance des lycées en 1802, “geste fondateur” qui “signifiait très concrètement la fin des privilèges de la naissance”, et posant les bases d’une France républicaine où ce qui comptait pour réussir, “ce n’[était] plus d’être bien né, c’[était] d’avoir travaillé dur et d’avoir fait la preuve par ses études de sa valeur”.
Et propulsant, de l’autre main, enfants et jeunes en des places - et d'une manière - que l’éthique et la règle républicaines récusent.
Enfants scolarisés, dont le seul "tort" est d'avoir suivi des parents aujourd'hui en situation irrégulière sur le sol français, poussés dans des centres de rétention administrative. Jeunes encore scolarisés, dans des taudis ou dans la rue. Dans les deux cas, au mépris de textes de droit censés s’appliquer sur le territoire de la république française ou reconnus par celle-ci.
Jeune à peine plus âgé (23 ans), encore scolarisé (2e année de droit) et dont le seul “tort” est d’être né d’un père devenu depuis Président de la république, poussé vers la tête de l’EPAD (établissement public chargé d’aménager, pour le compte de l’Etat et des collectivités locales concernées, le site de La Défense - actuel premier quartier d’affaires européen, soit 160 hectares où se gèrent des milliards d’euros).
Tenons-nous en à cet aspect des choses : si la tradition républicaine veut que dans les conseils d’administration des établissements publics les fonctionnaires ne votent pas pour élire le président, à l’EPAD depuis 10 ans les 9 fonctionnaires membres du conseil d’administration - nommés par l’exécutif - prennent part à cette élection.

Dans ces scènes contrastées, dont le théâtre s’appelle Centre de Rétention Administrative pour les uns, pour un autre “Cursus de Réussite Accélérée”, se lit en filigrane un message:

“C’est la Règle Abolie”...


Piégés eux-mêmes, ou témoins de ces scènes - tantôt déchirantes, tantôt aberrantes, en tous cas révoltantes - qui se jouent autour d’eux, quelle idée cohérente de l’éthique républicaine ces jeunes ou futurs citoyens peuvent-ils construire ? Comment dès lors s’approprieraient-ils les règles sous-tendues par cette éthique ? Est alors menacé de délitement un lien fondateur pour le "vivre-ensemble" : le lien que chacun noue, au fond de lui-même et dès l'enfance, avec la règle républicaine et ce qui la fonde.


Ce choix politique et le délitement dont il est porteur, certains responsables politiques tendent de fait à l'encourager. Par leur cécité devant le "spectacle" ainsi généré par l'exécutif. Cécité sélective, donc volontaire. Observateurs et auditeurs assidus de leurs “leaders”, ils ne semblent ni voir ni entendre ce qui se passe à quelques minutes de leur mairie ou de leur circonscription, ou au bout de la ligne de métro qui dessert leur ville. Ou encore, regardent ailleurs.
J'en ai fait la malheureuse expérience au sujet du CRA de Vincennes (voir mon post Laurent Lafon ou la "proximité à éclipses").
Faut-il y voir, à cet égard, une farce cruelle faite par Le Parisien à notre maire, ou une sorte de lapsus de la part de ce dernier ? En “une” du numéro d’aujourd’hui de ce quotidien, s’affichent “51% des sympathisants de droite [...] en désaccord avec la probable élection de Jean Sarkozy à la tête de l’Epad”. Dans le cahier central, Laurent Lafon applaudit des deux mains Nicolas Sarkozy... en proclamant son “sout[ien à] la vidéothèque en ligne”.


Placement d’enfants dans les Centres de Rétention Administrative (au mépris du primat de “l’intérêt supérieur de l’enfant” dans toute décision officielle concernant celui-ci, proclamé par l’Etat en signant la Convention internationale des droits de l’enfant dont c’est là l’article 3.1) ; propulsion d’un jeune, arraché aux bancs de l’université, dans un inédit “Cursus de Réussite Accélérée” ; jeunes et futurs citoyens acculés à constater que la devise de l’Etat, de “Liberté, Égalité, Fraternité” tend à devenir : “C’est la Règle Abolie !” ; responsables politiques proclamant, dans un mutisme assourdissant, “Courage, Regardons Ailleurs !”...
Mieux vaut prévenir que guérir. Ce triste "jeu" politique, si on scrute avec vigilance ses probables prolongements, si l'on est attentif aussi au ressenti et à l’intérêt de ceux qui ont à en vivre les conséquences au quotidien, ne peut que soulever en nous une exigence. Une exigence en forme de refus :

“Contre la République Abolie !”



mercredi 14 octobre 2009

Val-de-Marne: l'Université populaire de l'eau et du développement durable ouvre sa session 2009-2010

Hier soir, à Ivry-sur-Seine, s’est ouverte la session 2009-2010 de l’Université populaire de l’eau et du développement durable. Le premier cycle de conférences porte sur la problématique population - démographie - développement durable.
Au programme de la première conférence, très intéressante (à la fois précise sur le plan technique, et claire sur le plan des grandes lignes d’analyse) : “Démographie mondiale : sommes-nous ‘trop nombreux’ ?”. L’intervenant était le démographe Henri Leridon, professeur au Collège de France (chaire développement durable, environnement, énergie et société).
Prochains rendez-vous : “La faute à l’Inde et à la Chine ?”, avec Frédéric Obringer, chargé de mission au CNRS et Membre du Conseil de laboratoire du Centre d’Études sur la Chine Moderne et Contemporaine (mardi 20 octobre) ; projection-débat du film “Sous les pavés la terre” (de Thierry Kruger et Pablo Girault), avec Antoine Foucher, directeur des campagnes de Greenpeace et Serge Orru de WWF (mardi 10 novembre) ; “Climat et migrations”, avec Hélène Flaure Députée européenne, présidente de la Sous-commission aux droits de l’Homme de 2004 à 2009, membre de la Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (mardi 17 novembre).

jeudi 8 octobre 2009

Vincennes:l’Agenda21 miné par l’héritage de L.Lafon et de sa majorité ?


Mardi soir, à Coeur de ville, les Vincennois étaient invités à prendre part au premier “Forum 21”.
Autrement dit, le lancement concret de la démarche visant à doter Vincennes d’un Agenda 21.
Avec plusieurs militants de la section socialiste de Vincennes, nous étions naturellement présents dans les différents ateliers :
- “Lutter contre le changement climatique et relever le défi énergétique, dans une ville patrimoniale et historique” ;
- “Préserver la biodiversité, les milieux et les ressources naturelles dans une ville dense et peuplée” ;
- “Assurer la cohésion sociale, la solidarité et l’épanouissement de tous dans une ville attractive qui rajeunit” ;
- “Consommer et produire de façon responsable dans une ville dynamique et animée”.

Avec mes camarades de “L’Espoir à gauche”, nous étions en particulier présents dans les ateliers “Préserver la biodiversité, les milieux et les ressources naturelles dans une ville dense et peuplée”, et “Assurer la cohésion sociale, la solidarité et l’épanouissement de tous dans une ville attractive qui rajeunit”.
Dans ce dernier atelier, nous avons rappelé l'urgence de plusieurs priorités, sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir. Personnellement, dans la ligne de ce que je m’étais fixé (voir mon post du 20 septembre dernier), j’ai redit l'urgence de faire émerger à Vincennes un véritable espace public intergénérationnel. Aujourd’hui, Laurent Lafon et sa majorité se contentent de juxtaposer des cadres, quasiment ou totalement imperméables les uns aux autres, regroupant des Vincennois par tranches d’âge (conseil municipal des enfants ; conseil municipal des jeunes ; conseil des séniors...). C’est mieux que rien. Mais renoncer ainsi à faire se rencontrer les points de vue, de façon suivie, dans une démarche réellement intergénérationnelle... quelle perte pour le débat public et pour les Vincennois !

Revenons à l’événement lui-même. Un événement important, sur plusieurs plans.
Sur le plan historique d’abord, par son objectif. L’ “Agenda 21”, qu’est-ce que c’est ? Cette démarche, née en 1992 lors de la Conférence de Rio, consiste à élaborer un agenda pour le 21e siècle : un programme d’actions afin de s’orienter vers un développement durable de la planète, c’est-à-dire “un développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs”.
Au niveau local, l’ “Agenda 21” doit être l’aboutissement d’une réflexion collective à laquelle participent tous les acteurs économiques et sociaux, ainsi que les citoyens, en vue de faire converger les politiques de développement économique, de progrès social, et de protection de l’environnement.
À ce jour, 19 régions, 40 départements, 105 intercommunalités et 372 communes se sont déjà dotés de leur propre “Agenda 21”. En suivant aujourd’hui le mouvement, Vincennes affiche donc le souci d’épouser les grands enjeux du 21e siècle, certes sans pour autant innover.

Mais l’événement était important aussi sur le plan de la démocratie locale, en fonctionnant comme un révélateur impitoyable.
En effet, le 1er avril (!) dernier, Laurent Lafon avait déclaré : “Notre Agenda 21 ne sera viable que si les acteurs et les habitants se l’approprient, s’interrogent sur leurs actes quotidiens et concourent à l’élaboration des choix et à la mise en oeuvre des actions”.
Comme citoyen, on était alors tenté de compléter : “... et les habitants ne concourront à l’élaboration des choix que si ils perçoivent l’espace public vincennois comme le lieu d’une véritable démocratie participative ; c’est-à-dire un lieu où ils peuvent non seulement exprimer leurs points de vue, mais les voir ensuite peser de façon significative dans la gestion municipale”.
À cet égard, le premier Forum 21 fait figure de verdict pour Laurent Lafon et sa majorité. Les Vincennois sont pourtant sensibles aux enjeux de la solidarité intergénérationnelle et de l’éco-responsabilité. Ils l’ont clairement montré à travers la progression des socialistes lors de la dernière élection municipale (avec plus de 21% des voix la liste “Vivons Vincennes”, dont j’étais directeur de campagne, a fait entrer un élu socialiste supplémentaire au Conseil municipal), et le succès d’ "Europe Ecologie" dans notre ville lors des dernières élections européennes (plus de 25%). Mardi, malgré cet état d’esprit des Vincennois propice aux enjeux clé de l’ “Agenda 21”, l’appel de Laurent Lafon a trouvé peu d’écho. L’auditorium de Coeur de ville paraissait un peu grand, et les deux élus présents sur scène, bien lointains...

En fait, cette faible mobilisation est compréhensible : dans notre ville, les démonstrations de l’actuelle majorité en matière de démocratie participative n’ont jusqu’à présent guère convaincu. La démocratie participative ne se réduit pas à une mise en scène ; c’est une culture, ce sont des actes. Difficile de faire prendre un greffon sur un tronc sec. De la part des Vincennois, riches d’envies et d’actes en matière de solidarité intergénérationnelle et d’éco-responsabilité, on peut comprendre le manque d’entrain face à la démarche enclenchée par l’actuelle majorité municipale...
Une majorité dont, curieusement, le manque de volonté profonde en matière de démocratie participative s'exprime jusque sous la plume de Laurent Lafon. Dès les premières lignes du premier numéro de Rencontres de Quartier (le tout nouveau "journal des Rencontres de Quartier" édité par la Ville de Vincennes), l'actuel maire de Vincennes, entre concordance des temps facultative et lapsus autodestructeur, s'exprime en effet au conditionnel : "(...) la démocratie participative serait l'un des piliers de la nouvelle mandature". Dans cet emploi à "éclipse" de l'indicatif, se dit une implication à éclipses en matière de démocratie participative.

Ce probable impact des déficiences de la majorité actuelle est préoccupant pour l'avenir de notre "Agenda 21". C’est d’ailleurs ce que soulignait le document de travail remis aux participants à l’atelier “Assurer la cohésion sociale, la solidarité et l’épanouissement de tous dans une ville attractive qui rajeunit”. Parmi les conditions requises “pour relever le défi” dans ce domaine, ce document met en avant celle-ci : “Connaître “sa” population et ses besoins existants et émergents”.
Une exigence particulièrement prégnante quand il s’agit de réfléchir, par exemple, à l’ “accès” au loisir (autre exigence mise en évidence “pour relever le défi”). Parce que la part des chômeurs et des bénéficiaires de minima sociaux dans la population d’une ville fixe, naturellement, la hauteur des efforts à fournir à ses habitants en matière de frais d’adhésion ou d’inscription aux associations donnant accès aux loisirs (au travers de subventions notamment).
Or, comme d’autres participants, j’ai été stupéfait de constater que certains chiffres fournis, lointains ou approximatifs, empêchaient toute réflexion sérieuse dans ce domaine. Exemple : “7% de chômeurs en 2007”. Il y a 2 ans, donc. Et aujourd’hui, avec la crise économique dont on sait qu’elle touche aussi le Val-de-Marne (voir mon post d'avril 2009 Val-de-Marne: les "forces vives" en première ligne face à la crise), et risque d’affecter durablement la situation de l’emploi ? Autre exemple : “Environ 3% de RMIstes ou bénéficiaires des minima sociaux”. Je me suis permis de poser cette question de bon sens : ces chiffres datent-ils aussi de 2007 ? sinon, de quand ? L’animatrice n’a pas su nous répondre. De la municipalité (à commencer par les élus présents sur scène pour l’ouverture du Forum 21), on aurait pu attendre quelques rectificatifs sur des chiffres aussi essentiels. Sauf à se résigner à ce qu’une partie des Vincennois se trouvent, comme trop de nos concitoyens, piégés dans une sorte de "trape", un véritable angle mort (voir mon post du mercredi 15 juillet).

Pour éviter cela, une forte présence des Vincennois dans leur diversité, et en particulier dans leur diversité sociale, est capitale ! Même si cela exige d’oublier, momentanément, le bilan visiblement peu encourageant de Laurent Lafon et de sa majorité en matière de démocratie participative !

dimanche 4 octobre 2009

"Rencontres démocrates" : chronique d'une quinzaine placée sous le signe d’un double défi - renouvellement et démocratie


Retour à mon clavier après une quinzaine chargée. Chargée, et placée sous le signe d’un double défi : renouvellement, et démocratie. Réaliser l’un comme l’autre est décidément un combat! Réaliser l’un et l’autre apparaît souvent, particulièrement ces temps-ci, comme un seul et même combat. Pas plus facile pour autant à bien mener, et à gagner! Bref retour sur une quinzaine exigeante, et instructive, à cet égard.


Mardi 22 septembre, à Créteil : réunion à la fédération du PS val-de-marnais sur les projets “Grand Paris” et “Paris Métropole”. Une réunion intéressante, animée par notre camarade Jean Francheteau (président de la Commission université des savoirs), avec des interventions de Jean-Paul Planchou (vice-prsident de la Région Ile-de-France) et Fabien Ansel (secrétaire fédéral de Paris, membre du cabinet d’Anne Hidalgo, en charge de Paris Métropole et enjeux régionaux). En arrière-plan de chacun de ces projets, une ambition : renouveler les dynamiques et les synergies à l’oeuvre dans la zone constituée par Paris et ses proche et moyenne banlieues. Différence majeure (entre autres) entre ces deux projets : le caractère plus ou moins démocratique de leur élaboration, puis de leur mise en oeuvre éventuelle. J’y reviendrai une autre fois.

Samedi et dimanche derniers : assemblée générale extraordinaire d’Amnesty international (section française), pour élaborer et voter les nouveaux règlement intérieur et statuts de l’association. Un week-end de travail qui se tenait au centre des congrès de la Cité des sciences et de l’industrie à La Villette, et auquel je participais comme délégué de mon groupe (Vincennes, Saint-Mandé, Fontenay-sous-Bois). Parmi les enjeux forts du débat et de la réflexion : comment assurer le renouvellement de l’association (éviter le cumul des mandats dans le temps pour les “cadres”, favoriser l’investissement accru des jeunes...) ? comment garantir une réelle capacité d’expression et d’influence des acteurs de terrain (en particulier les jeunes) ?

Mardi : votation citoyenne sur l’avenir de la Poste, à Pierrefitte-sur-Seine (Seine Saint-Denis). Geste symbolique, à l’heure où, en matière d’intégration républicaine, l’Etat semble désinvestir certaines parties du territoire dont celle-ci. Cela se voit d’ores et déjà en matière de sécurité, tandis que par un système de “vases communicants”, les enjeux de sécurité auxquels sont confrontés les habitants de la Seine Saint-Denis concernent aussi les habitants du Val-de-Marne. En effet, depuis le 14 septembre dernier, la Préfecture de police de Paris (PP) gère elle-même les déplacements des effectifs de police en tenue, non seulement intra muros, mais également dans les Hauts-de-Seine (92), la Seine-Saint-Denis (93) et le Val-de-Marne (94).

Mercredi : AG de rentrée du groupe 96 d’Amnesty dont je fais partie, à Vincennes. Parmi les sujets abordés, bien sûr, la disparition annoncée de la Défenseure des enfants, à la veille du 20e anniversaire de la Convention internationale sur les droits de l’enfant (voir mon post du 24 septembre). Une initiative qui rappelle, de façon cruelle, que le renouvellement du paysage institutionnel se fait aussi quelquefois à rebours des enjeux démocratiques. C’est-à-dire de la capacité de chacun à faire entendre sa voix dans l’espace public – et en l’occurrence, à en devenir pleinement acteur.

Jeudi : à Vincennes, conférence du philosophe et historien Marcel Gauchet (invité à parler de l'éducation par l'association "Rencontres démocrates", à la maison des associations). L'occasion d'échanges très intéressants, notamment sur la place de l'autorité dans l' "école" telle qu'elle est aujourd'hui (institution scolaire, moyens, élèves, communauté éducative...). Profitant de l'occasion pour confronter ma propre expérience à la hauteur de vue et à l'expertise de M. Gauchet, j'ai apprécié de trouver un interlocuteur attentif et précis, au propos simple et riche à la fois. Un sentiment qui m'a paru largement partagé dans l'assistance, dont j'ai regretté de ne pas pouvoir partager la chance jusqu'au bout !
Le même soir à Vincennes, vote militant pour la “rénovation” du PS
. Malgré des réserves sur la formulation ambiguë de certaines questions, et donc leur portée concrète, j’ai le sentiment que cette consultation peut être un point de départ utile. Mais auquel on ne saurait s’en tenir. Au-delà d’une rénovation, tout le monde le sait, c’est une véritable renaissance qui s’impose aujourd’hui au PS. C'est d'ailleurs ce qu'avait affirmé Martine Aubry, dans sa première déclaration comme première secrétaire du Parti socialiste (Déclaration officielle de Martine Aubry, nouvelle Première secrétaire du PS, le 23 novembre 2008). Cette renaissance, elle exige d’oser la radicalité. Autrement dit : savoir aller à la racine, pour parler juste et agir fort.
À la racine du PS, il y a des valeurs, à réexplorer sans cesse pour voir quelles approches, quelles actions concrètes elles appellent dans l’époque présente. Le 150e anniversaire de la naissance de Jaurès (le 3 septembre dernier) en était une belle occasion, à mes yeux manquée par le PS.
À la racine de l’ “appareil” du PS, il y a des sections, des militants, des sympathisants. Dans la nécessaire renaissance du PS, c’est en réalité eux, le levier majeur. La preuve : le questionnaire sur lequel ils viennent de voter. Par leur vote massif pour une transformation en profondeur du PS lors du Congrès de Reims, les militants socialistes ont fait basculer ceux qui s’opposaient à cet élan... dans la démarche qu’il appelait. Essai marqué : à transformer... si l’aptitude à la radicalité est encore dans les “gènes” du PS.
À la racine des réalités sociales - et pas seulement des votes -, il y a des personnes. Il y a urgence à leur refaire une place majeure dans notre travail... ce qui implique de prendre le temps de les rencontrer, et pas seulement en période de campagne électorale !

Samedi après-midi, à Vincennes, accueil de nos concitoyens désirant s’exprimer sur l’avenir de la Poste (dans le cadre de la “Votation citoyenne”), au côté de camarades communistes, verts, « Parti de gauche », et d’autres socialistes bien sûr!
Un combat qui, en ce qui me concerne, n’est pas nouveau. Dès novembre dernier, avant que le PS ne rejoigne le mouvement, j’avais ainsi participé au rassemblement départemental contre la privatisation de la Poste devant la poste centrale de Créteil, puis “milité” au sein de ma famille politique pour que nous ne restions pas spectateurs de ce débat.
Origines rurales, refus de laisser s’installer, sur le territoire de notre république, des “angles morts” où l’on oubliera les besoins d’une partie de nos concitoyens : voilà, entre autres, ce qui fait mon attachement au service public de la Poste.
Constat aussi de ce qui se passe ailleurs en Europe, quand la poste a été privatisée. Échangeant cet après-midi avec un Italien de passage à Vincennes, j’ai appris qu’en Italie, où la Poste a déjà été privatisée, le délai s’est allongé entre l’arrivée du courrier dans les bureaux de poste et sa réception par les destinataires... au point que l’on n’appose plus de cachet indiquant la date d’arrivée du courrier au dépôt !
Bien sûr, il faut donner à la Poste les moyens de se moderniser, de s’adapter aux nouvelles demandes de ses usagers. Mais réduire nos concitoyens à l’état de spectateurs, puis finalement d’ “otages”, si l’on devait ouvrir la voie vers une privatisation, ne fait certainement pas partie de ces moyens. Entériner l’abandon de certaines parties du territoire français non plus. Pas plus que renoncer à la qualité du service rendu. Ce qui est en jeu, c’est aussi tout simplement la capacité de tous nos concitoyens à s’exprimer dans l’espace public !


Je conclus ce billet par un hommage à Marek Edelman, dernier commandant de l'insurrection du ghetto juif de Varsovie contre les nazis en 1943, dont on a appris la mort vendredi. Un militant, un combattant, dans la vie duquel il y a beaucoup à puiser, pour la réflexion comme pour l'action. Car non seulement sa mémoire, mais ses combats - pour la démocratie, contre le racisme - lui survivent.