mercredi 25 février 2009

Environnement et sécurité sanitaire : malgré la crise, ne pas “laisser filer” !


On dit que les habitants de Paris sont souvent les derniers à visiter la Tour Eiffel... C’est un peu ce qui s’était passé jusqu’à présent pour moi avec le Salon de l’agriculture. Aussi étonnant que ça puisse paraître, vu mes origines et mes liens avec le monde rural, je n’y étais encore jamais allé ! Mais il y a quelque temps que je ne suis pas retourné en Auvergne, et certains sons, certaines odeurs, certaines images commençaient à me manquer !

Avec... Obélix, "compatriote" d'1 tonne et quelques élevé dans le Cantal à Pierrefort (un des “berceaux” de ma famille maternelle)


Le Salon de l’agriculture, lieu de plaisir, donc. Mais aussi d’une meilleure connaissance de notre environnement “immédiat”...

Hier mardi, des exploitants d’Ile-de-France y ont sonné l’alarme : chaque année, sont “grignotés” plus de 2000 hectares du territoire rural de notre région (où la surface agricole représente encore 50% du territoire, soit 576 000 hectares sur 1,2 millions).
Cette évolution a été évoquée lors d’un colloque organisé au Salon par l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et la Chambre interdépartementale d’agriculture d’Ile-de-France. Chaque année, ce sont en moyenne 2000 hectares qui passent dans les projets d’extension urbains, poussant les exploitants à cesser leurs activités. Les plus touchés sont les arboriculteurs et les maraîchers, ainsi que les jeunes désireux de s’installer comme exploitants (car une entreprise agricole doit être gérée sur le long terme, les emprunts nécessaires à son exploitation devant être contractés sur au moins 20 ans).
À l’origine de ce “grignotage” : les projets d’extension urbains, auxquels s’ajoutent les projets urbains annexes (routes, réseaux ferroviaires, centres commerciaux...).
Le défi que cela soulève : trouver une combinaison “gagante-gagnante” entre compétitivité économique et compétitivité agricole (plus largement, valorisation de la partie du territoire francilien susceptible d’accueillir une activité agricole). C’est ce qu’a souligné Philippe Mauguin (directeur régional de l’agriculture, de l’alimentation et des forêts).
Première recommandation, de bon sens : “éviter de gaspiller des espaces en les bétonnant plus que de besoin”.
Deuxième recommandation : lorsqu’un grand projet est prévu sur un territoire, l’espace agricole doit être aussi envisagé comme une richesse (et une source de richesse), et non pas simplement comme une “réserve foncière”, même si “les besoins en logements et l’expansion des villes sont inévitables”.


Cette réalité qui travaille le territoire de notre région m'inspire deux réflexions.

1. Quand une municipalité située en territoire urbain ne joue pas pleinement le jeu républicain en matière de construction de logements, les conséquences sont certes difficiles à percevoir à l’échelle de la seule commune. À l’échelle régionale en revanche, on voit nettement combien est lourde la responsabilité d'un tel refus de prendre réellement toute sa part de l’effort collectif dans ce domaine. Même avec une marge de manoeuvre réduite en termes de réserve foncière permettant de construire un habitat facilitant réellement l’accès au logement (social en particulier), il est donc capital de ne rien gaspiller de cette marge ! Ce qui, à Vincennes par exemple, n’est à l’évidence pas le cas (beaucoup d'autres que moi l'ont déjà souligné, et j'aurai d'autres occasions de le faire).

2. Prenons garde à ce que notre environnement, et la qualité des rapports que nous entretenons avec lui, ne soient pas les grands sacrifiés des politiques mises en oeuvre pour faire face à la crise. Si la crise actuelle doit aboutir à l’émergence de nouvelles lignes de force en matière de modes de vie et de fonctionnement de l’économie, l’enjeu environnemental doit être pris à bras le corps au même titre, et avec autant de rigueur, que la lutte contre la précarisation et les exclusions. D'autant plus qu'elle se confond quelquefois avec cette lutte. Or à cet égard, certains signes ne manquent pas d’inquiéter...

Ainsi Bernard Vallat, directeur général de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), s’alarmait-il il y a quelques jours des conséquences déjà palpables de la crise (et de sa gestion par les Etats) sur la surveillance et la prévention des maladies animales transmissibles à l’homme. Car la tentation est grande de faire des économies sur les postes budgétaires correspondants, considérés en quelque sorte comme “dormants”. De fait, on observe un peu partout à travers le monde - tant dans les pays en développement que dans les pays développés - une décroissance des budgets publics dans les domaines relatifs à la santé animale, à commencer par les ressources affectées à la surveillance et à la détection précoce des maladies d’animaux (sauvages ou d’élevage). Cette tendance frappe notamment les “fonds de compensation” (provisions destinées à indemniser les éleveurs le cas échéant, et absolument nécessaires quand il s’agit de faire accepter à un éleveur la saisie et la destruction de ses bêtes, comme cela est apparu récemment dans plusieurs pays en développement avec l’épizootie aviaire causée par le virus H5N1). Or, assurer sur la durée une bonne gouvernance vétérinaire et une surveillance efficace coûte infiniment moins cher que la gestion tardive de crises sanitaires animales. L’enjeu est particulièrement significatif dans les pays encore aux prises avec la “grippe aviaire” (Egypte, Indonésie, Chine).

Plus près de nous, le tout récent arbitrage du Premier ministre britannique Gordon Brown de construire sur le site de l’aéroport d’Heathrow une troisième piste et un sixième terminal. Cela, malgré l’opposition de plusieurs membres de son cabinet, dont David Miliband (ministre de l’énergie et du réchauffement climatique). Et alors que Greenpeace déplore de voir l’aéroport ainsi étendu devenir “le plus gros émetteur de CO2 en Grande-Bretagne”.
Certes, la décision du premier ministre britannique est à replacer dans une politique visant avant tout à sauver le système bancaire britannique (une priorité après la faillite en septembre dernier de la banque Lehman Brothers), puis à limiter les effets d’une récession annoncée comme violente notamment en soutenant la consommation. (Le projet privé en cause à Heathrow devrait donner du travail à 65000 personnes d’ici à 2020, ce qui n’est pas négligeable.)
Mais Gordon Brown avait souvent répété que la crise financière serait l’occasion d’investir dans les secteurs porteurs de “croissance verte”. À cela s’ajoute, symbole fâcheux, celui de la préparation des Jeux olympiques de 2012 (accueillis à Londres), qui ne semble pas non plus très “vert”. Enfin, plus largement, cette décision s’inscrit dans un contexte qui voit l’annonce d’une série de grands travaux - où l’environnement fait figure de parent pauvre.


Doté depuis le printemps dernier d’une nouvelle “Déclaration de principes” à l’adoption de laquelle j’avais participé comme délégué fédéral, le Parti socialiste place désormais la qualité de notre environnement, et de notre rapport avec lui à travers le temps, au coeur de son projet politique. J'espère vraiment que nous saurons concrétiser cet engagement. Non seulement dans notre discours et nos prises de position face aux politiques n’allant pas dans ce sens, mais aussi dans nos propositions - par exemple au moment des prochaines élections européennes et régionales - et bien sûr le cas échéant dans leur mise en oeuvre. En matière d'environnement et de sécurité sanitaire, malgré la crise, ne laissons pas "filer" les choses ! Les enjeux méritent bien cet effort !


Aucun commentaire: