jeudi 26 mars 2009

5e Forum mondial de l'eau : inquiétudes à l'issue des discussions...



La semaine dernière s’est tenu, à Istanbul, le Forum mondial de l’eau. Sur les rives du Bosphore, plus de 25000 participants ont débattu des moyens de protéger et de préserver cette ressource.
Deux phénomènes rendent de plus en plus urgente la prise en charge sérieuse de ce défi : la croissance démographique (la population mondiale atteindra 9 milliards en 2050, contre 6,5 milliards aujourd’hui), et le réchauffement climatique.

Au regard de cette réalité, la déclaration politique à laquelle le Forum a donné lieu apparaît incontestablement décevante. Cette déclaration ministérielle, adoptée à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau (le 22 mars), n’a pas retenu la notion de “droit à l’accès à l’eau”. Pourtant, plusieurs pays (la France, l’Espagne, plusieurs pays d’Amérique Latine et d’Afrique) se sont efforcés d’obtenir la reconnaissance comme droit humain fondamental de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement de l’eau - qui reste donc assimilé à un simple “besoin”.
Cet infléchissement a provoqué une désapprobation si forte qu’une vingtaine de pays participants (parmi lesquels l'Espagne, l'Afrique du Sud ou le Bangladesh) ont signé une déclaration dissidente !
La France ne l’a pas signée, mais le Partenariat français pour l'eau (PFE), qui regroupe des représentants de l'Etat, des collectivités locales, des entreprises et des ONG, a "déploré" que la notion de “droit à l’accès à l’eau” ne figure pas dans la déclaration finale.
Dans ces conditions, rien ne garantit que la déclaration finale pourra constituer "un document qui servira de repère" (comme l'a estimé le ministre de l'environnement turc Veysel Eroglu).

Malgré tout, le Forum a donné lieu - c’était bien le moins - à un véritable foisonnement d’idées et d’échanges, et permis de rappeler les enjeux sous-jacents à la gestion de l’eau à l’échelle de la planète. En particulier, a été mis en relief le lien étroit entre eau, énergie, alimentation et santé, sécurité aussi.
Jacques Diouf (directeur général de la Food and Agricultural Organization) a notamment souligné que l’avenir de l’agriculture est indissociable d’une utilisation plus efficace de l’eau (à elle seule, l’agriculture représente 70% de la consommation mondiale).
Rappelons aussi que dans les pays en développement, environ 80% des maladies (diarrhées, choléra...) sont liées à la qualité insuffisante de l’accès à l’eau. Ou à d’autres phénomènes liés à celle-ci : le ministre de l’eau du Bangladesh a ainsi soulignéé l’ampleur des défis auquel est confronté son pays en matière d’inondations et d’érosion des berges.
Autre dimension elle aussi en arrière-plan des discussions : le risque de conflits liés à l’eau. De fait, quelques jours avant l’ouverture du Forum, l’ONU avait rappelé dans un rapport très clair la prégnance de cette réalité sur le plan géopolitique, qu’il s’agisse des fréquents conflits liés à l’irrigation, ou des conflits qui se produisent au niveau des cours d’eau transfontaliers.

Le prochain Forum mondial de l’eau se tiendra en 2012 (sont d’ores et déjà candidates pour l’accueillir les villes de Durban, en Afrique du Sud, et Marseille). Le temps d’avancer dans la prise en charge de ces enjeux ? Voire : la France a annoncé avant le Forum son intention de ratifier la convention des Nations Unies sur les cours d’eau transfontaliers adoptée en 1997... mais toujours pas entrée en vigueur faute d’avoir atteint le seuil des 35 ratifications nécessaires!
D’ici là, dans chaque pays, c’est donc aux acteurs associatifs et politiques que revient la responsabilité de faire le nécessaire pour mettre au coeur du débat public, dans toute sa portée, la problématique de la gestion de l’eau. Et pour faire avancer de manière réflexion et action dans ce domaine, de manière significative!

Aucun commentaire: