mardi 10 novembre 2009

Des murs... et de l’art de les faire tomber


Hier, nous célébrions le 20e anniversaire de la chute du mur de Berlin. Cette commémoration, avec ce qu’elle symbolise, trouve de multiples échos dans l’actualité. Offrant ainsi plusieurs lectures. J’en choisis une - peu originale j'en conviens : le rôle capital, dans la construction de l’Histoire et de la communauté internationale, de l’art qui consiste à faire “tomber les murs”.

S’agissant du mur de Berlin, on pense naturellement aux chefs d’Etat dont l’action concertée a permis que la chute se fît, et se fît sans bain de sang : George Bush père (alors président des Etats-Unis), Helmut Kohl (le “chancelier de la réunification”), François Mitterrand, Mikhaïl Gorbatchev. Lech Walesa aussi, d'une certaine façon.
Par une de ces coïncidences dont le sort a le secret, cette commémoration coïncide à quelques jours près avec la disparition de Claude Lévi-Strauss, et le retour sur l’enseignement de son oeuvre auquel elle a donné lieu. Et notamment, ce message universaliste, revenant à faire tomber mentalement quelques murs : par-delà les frontières mouvantes des Etats, l’humanité tout entière est structurée par des mécanismes universels ; comprendre les sociétés humaines, tisser entre elles les rapports constructifs qui font avancer l’Histoire, ouvrent l’avenir - et progresser ceux qui s’y engagent -, cela passe aussi par la prise en compte de cette réalité.
Une réalité dont certaines occasions privilégiées permettent de faire l’expérience. Ainsi de la visite rendue aujourd’hui à mon ami Yao Metsoko. Peintre togolais, celui-ci est actuellement en résidence à “La Butte Pinson”, domaine situé à Pierrefitte-sur-Seine (à la frontière de la Seine-Saint-Denis et du Val-d’Oise). Le site, magnifique, fait tout à coup tomber la frontière entre monde urbain et monde rural (c’est aussi une ferme pédagogique). De même, l’art de Yao fait ressentir, sous un habillage qui tresse les matériaux comme les univers culturels de référence, les forces et les flux qui irriguent en profondeur l’humanité. De quoi nourrir, sinon revitaliser la notion - au coeur de notre devise républicaine - de “Fraternité”.

Faire tomber un mur, me direz-vous, ne suffit pas à faire surgir quelque chose de l’autre côté. C’est vrai. Savoir inventer, créer ensemble, cela fait partie intégrante de l’art de “faire tomber les murs”. Quelques champs de travail stratégiques, ou d'occasions intéressantes...
Ainsi la réunification européenne, à laquelle la réunification allemande avait ouvert la voie, demeure-t-elle à réussir. À ce jour, elle est le plus souvent ressentie par les peuples d’Europe comme subie plus que voulue - alors qu’elle aurait dû être un grand projet fédérateur, marquer la naissance d'une nouvelle Europe, voire d'une Europe-puissance. Notamment faute de leaders entraînants et convaincants incarnant une volonté générale. Faute aussi d’un projet politique clair.
En matière de pratique politique, la campagne pour l’élection présidentielle de 2007 avait vu, à l’initiative de Ségolène Royal - d'ailleurs présente à Berlin lundi soir -, le Parti socialiste faire tomber le “mur” qui trop souvent le coupe de nos concitoyens. Un mur, soyons juste, dont il n’a pas le monopole ! Surcroît de mobilisation, retrouvailles avec une partie de l’électorat le plus modeste et des jeunes : un rassemblement, beau et porteur d’avenir parce que résolument en prise avec ce qui se passe en-dehors de l’ “appareil”, s’était alors encenché. Assumé avec fierté - avec sa dimension participative -, conjugué avec un travail de fond pour construire un projet politique capable de cristalliser un rassemblement progressiste - ce qui implique notamment que se tienne enfin la "convention sur le nouveau modèle de développement" que doit présider Pierre Moscovici -, ce rassemblement est un des chemins de l’alternance en 2012.
Plus spécialement en Ile-de-France et sur le plan culturel... Je rappellerai seulement qu’à la fin de la semaine s’ouvre le festival Africolor - qui fête lui aussi ses 20 ans. Organisé du 13 novembre au 20 décembre, en partenariat avec le Conseil régional d’Ile-de-France, il passera notamment à Bonneuil-sur-Marne. Une autre façon de rendre hommage - un spectateur “dépaysé” se faisant irrésistiblement acteur - à ceux qui “font tomber les murs”, de faire vivre leur art - et ce qui peut en naître !

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