samedi 5 septembre 2009

Grippe A - surpoids : cruelles «leçons d’outre-mer»


En même temps que l’année scolaire
(j'aurai l'occasion d'y revenir), la France métropolitaine s’efforce préparer sa confrontation avec la possible diffusion massive du virus H1N1 sur son territoire. Actuellement, on compte environ 3000 nouveaux cas par semaine sur l'ensemble du territoire français. Dans le Val-de-Marne, où le virus est « apparu » le 24 juin, la Préfecture a annoncé ce matin huit cas avérés de grippe H1N1 dans une classe de première du lycée d'Arsonval à Saint-Maur.
L’inversion des saisons entre hémisphères nord et sud fait que certains territoires d’Outre-mer, où c’est actuellement l’hiver, sont depuis un moment en première ligne. Outre les Réunionnais, les Néo-calédoniens, massivement touchés par le virus depuis déjà plusieurs semaines, en savent quelque chose.
D’un point de vue strictement quantitatif, l’épidémie tend à s’estomper en Nouvelle-Calédonie (consultations et absentéisme scolaire en net recul). Mais l’inquiétude des professionnels de santé ne suit pas - loin s’en faut - le même mouvement. En effet, plusieurs décès ont été enregistrés à l’hôpital de Nouméa, dont ceux de deux patients jeunes ne présentant aucun antécédent de pathologie (une femme de 46 ans, et un jeune homme).

Dans ce dernier cas, c’est bien l’effet aggravant du surpoids qui semble confirmée. Clairement formulé par la communauté médicale, cet impact du surpoids - et à plus forte raison de l’obésité - sur la vulnérabilité de l’organisme face au virus H1N1 trouve un écho dans les observations faites sur le continent américain.
Dès le 7 juillet dernier, l’Organisation mondiale de la santé relevait ainsi qu’une « forte prévalence de l’obésité [indice de masse corporelle supérieur à 30] a été rapportée au début chez les cas très graves ou mortels par les cliniciens mexicains » L’OMS mettait aussi en avant les résultats édifiants d’un rapport récent : sur 10 patients ventilés dans des services de soins intensifs du Michigan (États-Unis), 9 avaient un indice de masse corporelle supérieur à 30 et 7 un IMC supérieur à 40 ; sur les 50 cas mortels recensés en Californie, 30 avaient un IMC dépassant 30 (dont 11 ne présentant pas de facteurs de risque connus de complications).
Si les mécanismes par lesquels surpoids et obésité interviennent dans l’action du virus sur l’organisme restent à mettre au jour, leur effet aggravant sur cette évolution apparaît avérée.

Dans cette funeste « synergie », et indépendamment même du nombre de cas, force est de voir un nouvel – et cruel – avertissement. Avertissement quant aux dangers du manque de rigueur des politiques publiques, et de ceux qui les font, face à certaines réalités - redoutables par leur caractère peu spectaculaire même, tant leur portée peut ne se révéler qu’une fois installée la situation de crise.
Deux exemples.
Le 25 février dernier (un mois avant l’apparition de l’épidémie au Mexique), dans un « post » intitulé : « Environnement et sécurité sanitaire : malgré la crise, ne pas « laisser filer » ! », je relayais une inquiétude quant aux conséquences déjà palpables de la crise (et de sa gestion par les Etats) sur la surveillance et la prévention des maladies transmissibles à l’homme par les animaux (sauvages ou d’élevage). Un peu partout à travers le monde - tant dans les pays en développement que dans les pays développés -, on constatait déjà une décroissance des budgets publics pour les postes budgétaires correspondants, considérés en quelque sorte comme “dormants”.
Le 7 mars dernier, dans un autre « post » intitulé : « Obésité infantile : pour plus d’efficacité, osons franchir un cap ! », j’appelais à prendre la mesure du problème de santé publique que représente l’obésité. Le raisonnement : cette réalité touche ou menace une part non négligeable de la population - en particulier les jeunes - ; désormais, elle frappe avec une inégalité croissante en fonction de l’origine sociale ; il faut donc dès maintenant faire l’effort de se hisser, en matière d’action des pouvoirs publics, au niveau de rigueur et d’efficacité qu’exigent l’impact de ce phénomène sur les organismes, et son évolution au sein de la population française.
J’annonçais avoir écrit le même jour à M. Patrick Beaudouin, député de notre circonscription, pour lui demander de voter pour l’adoption de l’amendement 552 à la loi sur l’hôpital – alors en discussion à l’Assemblée nationale -, porteur d’un tel effort.
Dans une réponse qui avait le mérite – réel – d’exister, M. Beaudouin m’expliquait que, n’ayant pas assisté à la séance au cours de laquelle a été débattu cet amendement, il était toutefois satisfait de la position de la ministre de la santé qui avait conduit à le rejeter. Une position qu’il s’efforçait de justifier (voir mon post du lundi 20 avril, « L’ « absence attentive » de Patrick Beaudouin… »). J’avais dit la faute que constituait à mes yeux une attitude qui, manquant au principe de solidarité inter-générationnelle, « ne pren[ait] pas la mesure d’une véritable urgence ».

Les opposants à la politique plus rigoureuse des pouvoirs publics en matière de prévention de l’obésité (dont relevait l’amendement 552), avaient alors tiré argument de la crise économique. On ne pouvait, selon eux, prendre le risque d'un manque à gagner pour les annonceurs. Autrement dit : un curieux avatar du principe de précaution (au bénéfice financier de ces derniers) devait primer sur l'effort de protection (des jeunes contre surpoids et obésité).
Le vécu personnel sans doute, dont on n’est certes pas seul maître, la confrontation à certaines réalités au travers de ses activités quotidiennes, aussi, font la plus ou moins grande lucidité de chacun face à ces problématiques et à leurs enjeux.
J’aurais malgré tout souhaité que les inquiétudes et les avertissements exprimés sur ce blog – et probablement ailleurs - ne trouvent pas a posteriori une telle illustration.
Souhaitons que ceux qui ont aujourd’hui charge de nous représenter, comme de garantir les conditions de notre quotidien et de notre avenir, apprendront à entendre la part d’intérêt général dont elles sont porteuses – d’où qu’elles viennent. Et fassent leur, en matière de santé, cette exigence : « malgré la crise, ne pas « laisser filer»! »

1 commentaire:

Balle Hervé a dit…

C'est un très bon article qui a le mérite d'être clair.

Personnellement, la crise économique ne doit pas conduire à un renoncement en matière de santé et d'éducation qui mérite au contraire des efforts soutenus de la part des états dans cette période actuelle.
On peut regretter le constat actuel de la politique gouvernemental qui supprime des postes dans l'éducation notamment au niveau des RASED et qui en matière de santé après avoir fait voter les franchises médicales envisage d'augmenter le prix de séjour à l'hôpital de 25% et rembourser moins bien certains médicaments.

Tout cela conduira inévitablement à terme à que des personnes refusent de se soigner faute de moyens nécessaire.

Au niveau de l'éducation, il y a une crise majeure dans son système de fonctionnement et ce sera avec plaisir que j'expliquerai mon avis sur ce sujet quand le moment viendra.