dimanche 13 septembre 2009

Ecole, entreprises, fiscalité: leçons de rentrée... et devoir de socialistes!


Les élections européennes de juin dernier avaient, à peu de choses près, coïncidé avec la fin de l’année scolaire. En cette période de rentrée, on voit se confirmer l’enseignement principal que l’on pouvait alors, par-delà les chiffres “bruts”, retirer de ce scrutin. La capacité à innover tout en redonnant à l’humain une place centrale dans la pensée et l’action politiques étaient apparues comme les exigences du temps nouveau qui, comme on pouvait le pressentir depuis quelque temps déjà, était en train de s’ouvrir. De cet humanisme créatif, l’actualité des deux dernières semaines a rappelé avec force - parfois violence - la nécessité.


Rentrée scolaire : derrière les chiffres, des espérances... et des êtres !

Je ne dresserai pas ici le "bulletin de notes" de cette rentrée scolaire. D’autres déjà l'ont fait. Je dois au passage mentionner l’initiative prise mardi dernier dans ce domaine par la majorité municipale (PC) de Valenton. Mardi soir se tenait en effet à l’école Henri Wallon un Conseil municipal extraordinaire sur la défense de l’école publique, organisé de manière à ce que les personnes de l’assistance puissent participer au débat. Compte tenu de l’appel que, de retour du Plessis-Trévise, je lançais à nos élus locaux le 3 juillet dernier (“écoute, exigence, imagination” dans l’organisation du débat public), je ne peux que saluer cette initiative !
En tendance, on sait comment les choses évoluent : toujours moins de moyens pour l’enseignement primaire et secondaire, et des faux-semblants dangereux en matière de petite enfance. Un chiffre quand même : à la date du 5 septembre, environ 800 élèves parisiens du secondaire n’avaient toujours pas d’établissement (soit parce qu’ils estimaient avoir été affectés dans un établissement trop loin de chez eux ou ne proposant pas les options demandées et avaient refusé de s’y inscrire ; soit parce qu’ils avaient déménagé pendant l’été et n’avaient toujours pas de place).

De mon point de vue, l’éducation fait partie des quelques “secteurs stratégiques” qui constituent, de fait, le creuset de notre avenir. Elle détermine en grande partie la qualité de celui-ci, pour chacun et pour la collectivité. À ce titre, compte tenu de l’aggravation des inégalités d’origine sociale et des nécessaires adaptations (voir mon post du 26 décembre dernier), elle mériterait pleinement - en particulier en matière d’accueil dès la petite enfance - de bénéficier d’innovations adossées au “grand emprunt” annoncé par le Président de la République. Un besoin d'innovation d’ailleurs souligné le 4 septembre dernier, dans la déclaration commune du collectif Un pays, une école, notre avenir, rassemblant syndicats d'enseignants, parents d'élèves, organisations étudiantes et lycéennes, associations pédagogiques (FCPE, FSU, Unsa, Unef, UNL, Ligue de l'enseignement...).

Quoi qu'il en soit, ce domaine de la vie nationale ne paraît pas compter parmi les secteurs stratégiques aux yeux du président de la République (voir mon post du 26 août dernier). Reste le combat pour faire entendre le caractère inquiétant de certaines situations ou modes de gestion. Austère labeur, digne d’un Sisyphe, tant le gouvernement demeure obstinément aveugle et sourd aux avertissements de ceux qui les vivent quotidiennement.
Un seul exemple, symbolique de cette cécité. Conformément à la loi "pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées" (du 11 février 2005), de plus en plus de collèges accueillent en leur sein des “Unités pédagogiques intégrées”. Aux termes des textes qui les définissent - et en réalité -, “les élèves admis dans les UPI sont des pré-adolescents ou des adolescents présentant différentes formes de handicap mental qui ne peuvent être accueillis à temps complet dans une classe ordinaire et pour lesquels l'admission dans un établissement spécialisé peut être différée.”
Des élèves, donc, dont le profil appelle une adaptation du travail scolaire et un environnement scolaire permettant de compenser, autant que possible, la “discontinuité éducative” liée notamment à leur suivi médical (SESSAD). Au collège par exemple, ces élèves sont intégrés pour l’année entière dans une classe déterminée. Or, ils ne sont pas... intégrés aux effectifs de cette classe ! En clair, ils n'en font pas officiellement partie ! Une sorte de “déni d’existence” que nombre d’enseignants, choqués, dénoncent.
Et tandis que le rocher de plaintes monte - en attendant, infailliblement, de retomber -, de jeunes concitoyens vivent leur scolarité. Le combat doit donc se doubler d’une attitude active envers eux. Les chiffres à la baisse ne doivent pas détourner notre regard de leurs talents, ni de ceux - les parents d’élèves - qui s’efforcent de les accompagner dans leur maturation.

À côté de la promotion d’un système éducatif renouvelé - il en a incontestablement besoin -, la créativité s’impose donc. Elle s’impose d’autant plus qu’un contexte de crise réduit les marges de manoeuvre budgétaires - d’une manière encore aggravée par les choix économiques et fiscaux du gouvernement Fillon.
Elle passe par une meilleure prise en compte des êtres dont l’avenir s’invente ici, mais aussi de ceux qui peuvent les accompagner dans cette odyssée quotidienne. Il y a quelques jours (mardi 8 septembre), le "supplément Val-de-Marne" du Parisien saluait le beau - et utile - projet intitulé “La mallette des parents”. Une initiative au lancement de laquelle j’ai eu la chance de participer l’année dernière (voir article du NouvelObs ci-contre). À présent, elle concerne 52 établissements, 13 dans le Val-de-Marne (dont Joliot-Curie à Fontenay-sous-Bois). Penser de façon nouvelle, plus concrète, la participation des parents d’élèves à la scolarité de leurs enfants est aussi une façon de réformer l’éducation nationale. Avec de premiers résultats semble-t-il prometteurs.

Reste qu’on peut s’interroger sur l’avenir de ces “promesses”, dans un contexte de discontinuité éducative croissante (remplacements tardifs faute d’un nombre d’enseignants suffisants, courts amputés faute d’une discipline qui vole régulièrement en éclats dans des classes surchargées...). Car les parents d’élèves sont aussi des personnes et des travailleurs. Des personnes usées, pour certaines, par les effets de la... non-mise en oeuvre du “Plan espoir banlieues” - dont l’intitulé semble avoir vocation à compenser, telle une formule magique, l’incapacité à susciter le moindre espoir sur le terrain. Des travailleurs aussi, dont la disponibilité pour leurs proches n’est guère, c’est le moins que l’on puisse dire, favorisée par la politique de l’actuel gouvernement en matière d’organisation du travail.
Il y a donc là pour le PS matière à réflexion. Espérons que le groupe de travail mis en place il y a quelques mois par la direction du PS fasse sien l’ “esprit de projet” qui semble vouloir faire son retour rue de Solférino !


Entreprises : "Pour que vive le travail, faire toute leur place aux travailleurs !"

Cette semaine a été marquée par l’annonce, coup sur coup, de deux tentatives de suicide de la part d’employés de France Télécom. Déjà bouleversantes en elles-mêmes, ces nouvelles le sont plus encore quand on entend le témoignage des salariés de l’entreprise, qui visiblement accusent le coup. Ces drames s’inscrivent dans un contexte de restructuration à marche forcée de l’entreprise, vécue de façon brutale par des employés victimes à la fois d’une pression écrasante et d’un management ressenti comme inhumain (travailleurs déplacés comme de véritables pions, ce qu’on appelle pudiquement la “mobilité subie”).
Il y a plusieurs mois déjà, la crise économique laissait craindre de telles épreuves pour les travailleurs de nombreuses entreprises. De ces inquiétudes, je m’étais, parmi d’autres, fait l’écho (voir mes posts des 20 et 24 décembre derniers). Notre devoir, comme socialistes, est de redonner au monde de l’entreprise une place centrale dans notre travail de réflexion. C’est notamment ce que j’appelais de mes voeux dans le mémoire remis à notre secrétaire national à la formation au printemps 2008, intitulé Pour une politique du pouvoir-vivre.
Écouter, réfléchir, innover. Dans quel sens ? Dans une partie de mon travail (“Pour que vive le travail, faire toute leur place aux travailleurs”), partant du constat d’une véritable “montée organisée de la mal vie au travail”, je proposais comme priorité de “lutter contre la précarisation de la santé, physique et mentale, au travail”, en soulignant que déjà dans notre pays “tous les indicateurs [étaient] actuellement au rouge” en matière de risques psychosociaux au travail.
Citant Patrick Légeron, co-auteur en 2008 du Rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail, je soulignais qu’entre “pressions et exigences constantes”, “changements incessants”, “frustrations très fortes”, ou encore mise en compétition systématique des individus les uns avec les autres, toutes les causes de stress étaient aujourd’hui en croissance dans notre pays. Une réalité, à l’époque déjà, venait de trouver une tragique illustration dans la série de suicides survenus au cours des mois précédents parmi les employés du Technicentre Renault à Guyancourt.
Parmi les pistes d’action innovante proposées : investir massivement dans le soin des maladies mentales, en mettant notamment en oeuvre d’autres moyens que les anti-dépresseurs ; développer les possibilités d’expression, ainsi que le pouvoir d’action et de décision des travailleurs dans leur environnement professionnel - dont ils sont parmi les meilleurs connaisseurs -, en particulier dans le domaine de la gestion du temps de travail et dans le sens d’une réduction des mobilités subies.
C’est pour prolonger et nourrir cette réflexion que je participais à la journée PME organisée en juin dernier rue de Solférino. Dans cet esprit encore que j’étais présent à l’Agence de développement du Val-de-Marne peu avant (voir "Val-de-Marne : TPE et PME, des acteurs clé du territoire à ne pas "laisser tomber"). Notre travail en la matière est loin d’être fini... les socialistes sont les premiers à en convenir !


Fiscalité écologique : inventer une fiscalité écologique... et humaine !

Innover en donnant toute sa place à l’humain. Une ambition qui apparaît aussi d’une actualité criante en matière fiscale, avec le débat autour de la “taxe carbone”.
Sous peine de perdre tout son sens, l’idée - excellente sur le principe - d’une fiscalité écologique ne doit pas faire abstraction des réalités humaines. L’humain ne fait-il pas partie du vivant ? Cette fiscalité ne doit donc pas servir de cheval de Troie à une aggravation des injustices sociales, par l’écrasement des revenus modestes qui en seraient frappés parmi les premiers. De ce point de vue, Ségolène Royal a socialement raison quand elle met en garde contre une mise en oeuvre “brutale” et indifférenciée, façon TVA, de la “taxe carbone”.
Pour échapper à cet écueil, c’est une réforme globale de la fiscalité qui s’impose pour permettre, sans en trahir l’esprit, un “impôt écologique” tel que la taxe carbone. Dans ce domaine aussi, assumer son rôle c’est pour le PS se montrer capable d’un humanisme créatif. En concevant un tel projet de réforme fiscale, qui n’ “écrabouille” pas les réalités humaines.
Un effort que certains, au sein de notre famille politique, appellent de leurs voeux depuis quelque temps déjà. Je pense notamment à Gaëtan Gorce (voir "L'Espoir à gauche : l'esprit de projet !", post du 14 avril dernier).


Le temps me manque pour dire quelques mots de la vie associative (c'était le 5 septembre la "Journée des associations" à Vincennes). Ces jours-ci pourtant, j’assiste - et je participe modestement - aux premiers pas d’une initiative locale qui me tient à coeur, généreuse dans son principe et innovante dans sa forme. À cette initiative dont j’aurai l’occasion de reparler, et qui pour moi incarne cet humanisme créatif dont la nécessité se lit de toutes parts, je souhaite amicalement bonne chance et longue vie !

1 commentaire:

Hervé Balle a dit…

Beaucoup de problèmes actuels concernant l'attribution des places au sein des établissements scolaires et des inégalités de niveau entre établissement se sont accrus avec la suppression de la carte scolaire.

L'assouplissement de la carte scolaire a accentué la logique de fuite des établissements les moins réputés vers des établissements jugés meilleurs ce qui s'est traduit par un renforcement des déséquilibres géographiques et des ségrégations multipliées.

Un second problème c'est l'importance assez récente donnée au critère de "boursier".

Cette mesure pourrait se rapprocher des systèmes de quotas mis en place au nom de l’équité dans certains systèmes scolaires. Mais ce critère n’a pas été appliqué de façon systématique. Surtout, il accentue le problème des inégalités entre établissements.
En effet, les boursiers qui bénéficient de l’assouplissement de la carte sont essentiellement de bons élèves. Il peut paraître juste à l’échelle individuelle que leurs efforts ne soient pas entravés par les caractéristiques de leur environnement scolaire. Pourtant, leur départ a des conséquences négatives pour les établissements dont ils sont issus. Ce critère ne suffit donc pas à limiter les effets pervers du libre choix.
Il est nécessaire de développer d’autres moyens de régulation.