lundi 20 avril 2009

L' 'absence attentive' de Patrick Beaudouin...


Début mars, 40 associations avaient signé un appel demandant aux députés de voter pour l'amendement 552 à la loi Bachelot
(par ailleurs si controversée aujourd'hui voir mon post de samedi). Concrètement, de quoi s'agissait-il ? De supprimer, au cours et autour des “émissions dont une partie importante du public est constituée d’enfants et d’adolescents”, des publicités portant sur “des boissons et des produits alimentaires manufacturés avec ajout de sucres, matières grasses, ou édulcorants de synthèse”.

Pourquoi cette initiative ?
- D’après les études médicales, 18 % des enfants de 3 à 17 ans, soit près d’un sur cinq, sont en surcharge pondérale (avec 3,5 % considérés comme obèses). Coïncidence ? 60% des enfants en rentrant de l’école regardent la télévision - où les publicités pour les aliments vecteurs de surpoids atteignent alors un "pic" en terme de fréquence.
- En février, la ministre de la Santé s'était engagée à mettre en place une mesure d'encadrement réclamée par l'INSERM, l'AFSSA, ainsi que par un récent rapport parlementaire. À savoir : lors des programmes destinés au jeune public, n'autoriser la publicité que pour les produits alimentaires ayant des teneurs raisonnables en matières grasses, sucre et sel.
Option entretemps abandonnée sans explication. Et remplacée par une charte dans laquelle les régies publicitaires s'engagent uniquement à faire de la "sensibilisation".
Utile, mais clairement insuffisant de l'avis général. En outre, en contrepartie de cette charte, il semble que les régies publicitaires aient exigé que les pouvoirs publics s'engagent à ne plus réglementer ou légiférer dans le domaine de la publicité pour les 5 années à venir.

Concerné par ce sujet (notamment pour des raisons professionnelles, et aussi en raison du rôle capital que la solidarité intergénérationnelle me paraît jouer dans le bon fonctionnement de notre société), j’avais alors, comme citoyen, adressé un courrier à M. Beaudouin, maire de Saint-Mandé et député de notre circonscription.
J’y exposais les réalités et les arguments qui plaident pour une action plus efficace en matière de prévention de l’obésité - et pour la mesure portée par l'amendement 552. Je lui demandais aussi, dans l’hypothèse où il prendrait connaissance de mon courrier trop tard, de m’indiquer s'il en était d'accord les raisons de son vote.

Dans sa réponse (en date du 30 mars), M. Beaudouin m’explique que, “retenu par d’autres obligations”, il regrette de n’avoir pu assister à la séance au cours de laquelle l’amendement a été voté. Il se dit toutefois satisfait de la position de Madame Roselyne Bachelot qui a conduit à rejeter l’amendement.
1er argument : “Un accord négocié peut en effet, parfois, se révéler plus efficace que la contrainte législative.”
2e argument, un engagement à être “très attentif à ce que les engagements pris sont tenus” (sic) : “Si ce n’est pas le cas, ou s’ils se révèlent insuffisant (sic), il sera alors temps de recourir à la loi. Telle est, d’ailleurs, la position de Roselyne Bachelot qui, après avoir rappelé que le respect de la charte [“visant à promouvoir une alimentation et une activité physique favorables à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision”, initiative des ...] feraient (sic) l’objet d’un suivi par le Conseil supérieur de l’audiovisuel et un comité de suivi, s’est engagé à prendre des mesures plus coercitives le cas échéant”.

On ne peut qu'être d'accord avec le premier argument... sur le principe. Malheureusement, remis en contexte, le tout accuse de graves faiblesses.
Le contexte :
- l’impartialité du CSA vis-à-vis de l’exécutif fait aujourd'hui l'objet d'interrogations (mercredi 8 avril dernier, le Conseil d’Etat a annulé la décision du CSA de ne pas prendre en compte les interventions du Président de la république dans le calcul du temps de parole du pouvoir exécutif) ;
- au Royaume-Uni - où le gouvernement est pourtant réputé peu directif et “coercitif” - il y a déjà 1 an et demi que l’interdiction a été jugée nécessaire ;
- la “charte” en question ne traduit pas une volonté de "partenariat salutaire" de la part des régies publicitaires ; au contraire : elle repose sur le refus de toute limitation des publicités pour des produits alimentaires favorisant l’obésité (demandée par un nombre impressionnant d’associations, de la Société française de santé publique à l’Association nationale des Directeurs de la Restauration municipale, en passant par la FCPE, la PEEP ou encore UFC-Que choisir ).


La réponse de M. Beaudouin a le mérite - réel - d'exister. Mais sur le fond, elle ne prend pas la mesure d'une véritable urgence - tout aussi réelle -. Face aux réalités en cause, ménager les logiques mercantiles n’a aucun sens. J'y vois notamment un manquement au principe de solidarité intergénérationnelle - dimension pourtant essentielle de toute décision politique aujourd'hui.


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