jeudi 12 mars 2009

Liste pour les élections européennes : oui… à une mise en pratique plus stricte du non-cumul !


Nous votons ce soir pour les listes de nos candidats pour les élections européennes de juin prochain. On le sait (les médias s’en font suffisamment l’écho), ces listes provoquent des remous, voire de la colère.
Comment en est-on arrivé là ? Qu’est-ce qui est en jeu, aujourd’hui, et pour après les élections européennes ? Cela, il faut un tout petit peu plus de temps pour y voir clair. Moi, en tout cas, il m’en a fallu. Mais j’en avais besoin pour décider ce que j’allais voter – et à quoi cela m’engage, comme militant, pour la suite.


D’où viennent les tensions autour des listes ?

Quelques éléments de réponse. Certains sont à mettre sur le compte de réalités objectives, indépendantes de l’actuelle direction du PS. D’autres, sur le compte de réalités héritées, au sein du PS, du congrès de Reims. D’autres enfin, tiennent à des choix de l’actuelle direction – dont certains d’ailleurs sont à mettre à son crédit.

1) L' "héritage" du Congrès de Reims. En particulier, le « tir groupé » des proches de Martine Aubry dans le Nord-ouest, où ils occupent les places éligibles, a contraint à trouver des points de chute pour ceux qui du coup étaient écartés (Vincent Peillon par exemple).
2) Pour la nouvelle Première secrétaire du PS, les marges de manœuvre étaient d’autant plus réduites que, pour être élue, elle a dû s’appuyer sur une majorité fragile associant des courants très divers, eux-mêmes organisés autour de plusieurs personnalités fortes et de leurs proches.
3) L’actuelle direction du PS n'a pas eu d'autre choix que de prendre en compte le poids, au sein du PS, des signataires de la motion E (mise en tête par les militants lors du Congrès de Reims, ce qui rendait ses représentants incontournables).
4) Outre la parité, l’actuelle direction a aussi voulu prendre en compte la « diversité », et respecter de manière plus stricte le principe de non-cumul des mandats.
5) Autre réalité qui contribue à « tendre » les débats : a priori, le PS aura moins d’élus qu’aux dernières élections européennes, à la fois parce que son score avait alors été exceptionnellement haut et parce que, avec l’élargissement de l’UE, le nombre de places réservées à la France au Parlement européen s’est réduit entre temps.


Quels enjeux ces tensions (re)mettent-elles en lumière ?

Osons-nous assumer la logique qui va de par avec l’importance prépondérante de l’élection présidentielle dans notre système politique, tel qu’il est ? Fin janvier, j’avais reproduit sur mon blog un article du Monde intitulé « Digérer le vinaigre de Reims », dans lequel cet enjeu était mis en évidence par deux des meilleurs connaisseurs du PS (Gérard Grumberg et Alain Bergougnioux). On y trouvait notamment cette analyse :
« Ce congrès a fait éclater la contradiction entre les deux logiques à l'oeuvre dans le parti depuis sa création à Epinay en juin 1971. D'un côté, le principe de la représentation proportionnelle des motions dans les instances dirigeantes et de la délibération collective pour définir la ligne politique. De l'autre, le principe de l'élection directe du leader par l'ensemble des adhérents dans une logique majoritaire empruntée au mode de scrutin présidentiel français. (...) Le congrès a échoué à définir une ligne politique puis à désigner un leader dont la légitimité puisse s'imposer à tous. »
Désormais, le fonctionnement démocratique du PS ne doit désormais se réduire à concilier en permanence les aspirations des courants. Mais dans l’adoption d’une ligne homogène et de son représentant ou sa représentante, par la majorité des militants. La construction du projet politique dans son détail se faisant ensuite, collectivement, autour de cette colonne vertébrale ferme. Sinon, la logique de gestion ou de "survie" remplace tout véritable pouvoir-vivre.

Dès lors, quelle place… et quel rôle pour les « courants » ? Au niveau national, et pourquoi pas local, les « courants » peuvent être utiles. À condition d’être d’authentiques pôles de travail, de véritables courants de pensée, affluents d’une réflexion politique commune. Dans son livre Choisir. Lettre ouverte à tous ceux qui veulent encore espérer de la gauche, Gaëtan Gorce fait des propositions très intéressantes dans ce sens. Dans le Val-de-Marne par exemple, le pôle issu de la motion E, pour ce que j’en vois, fonctionne bel et bien dans cet esprit, avec des résultats intéressants !

Les sacrifices exigés de la "base", en prenant sur soi comme militant ou comme représentant d’un territoire, sont-ils respectés au PS? Autrement dit le PS fera-t-il, dans la durée, une place réelle aux principes par lesquels on justifie ces sacrifices? Par exemple : la rigueur accrue dans la mise en pratique du non-cumul des mandats, si elle frustre des aspirations légitimes à prendre part au travail du Parlement européen, peut néanmoins constituer un « sacrifice utile » si elle se confirme dans la durée. Autrement dit, si l’exigence stricte de non-cumul est désormais mise en pratique à chaque investiture pour les scrutins (de liste ou uninominal).

À partir de là, quelle « mission » pour les sections locales et les acteurs locaux du PS (secrétaires fédéraux et de section, élus, militants…) ? Avant tout, faire en sorte qu’on parle plus de l’Europe et des européens et moins de la pré…-préparation de la campagne pour les élections européennes ! Ne pas avoir su éviter cela, reconnaissons-le, est un échec pour l’actuelle direction du PS. Je crains que cela ne se traduise ce soir par une abstention très forte de la part des militants socialistes. Et, pour en avoir animé plusieurs, je sais que cela n’est jamais bon à la veille d’une campagne.
Et puis, aussi, nous appliquer à nous-mêmes cette exigence de rigueur en matière de non-cumul des fonctions partisanes et électives (mandats, fonctions internes, investitures…). Pourquoi ?
Entre autres, parce que c’est ainsi que la part des ambitions individuelles se réduira, au bénéfice d’une authentique passion, cultivée et mûrie, de l’espace publique et du travail au plus près de nos concitoyens.
Et aussi, pour sortir du goulot d’étranglement, auquel se trouve aujourd’hui confrontée la direction du PS, en matière de promotion de la « diversité ». Quand on écoute les personnes concernées, on se rend bien compte que ce n’est pas servir cette cause que de confier « au nom de la diversité » des places à des camarades qui souvent, refusant d’être la « touche colorée » dans le tableau, n’en veulent pas. Appliquer avec rigueur le non-cumul des fonctions et des responsabilités, c’est multiplier les possibilités de parcours formateurs pour les militants socialistes. Donc donner à des talents beaucoup plus nombreux l’occasion de se révéler, ce qui est naturellement la première étape vers une meilleure représentation de la société française dans sa diversité.
Du coup, pour enclencher le mouvement au niveau de nos sections, savoir donner aux militants l’envie de militer, et l’idée d’être eux aussi à l’initiative dans la vie de leur section même quand ils n’y ont pas une fonction « officielle ». Pour l’avoir vécu lors de nos dernières campagnes, c’est la première chose que je regarde dans une section socialiste pour voir sa vitalité !


Oui… à l’application plus stricte du non-cumul !

Malgré mes réserves, ce soir je voterai oui. Principalement pour dire oui à la mise en pratique plus stricte du non-cumul, passage obligé vers une rénovation concrète et profonde du PS et de son projet. Je plaide cette cause depuis assez longtemps, pour savoir qu'il ne faut laisser passer aucune occasion de la faire avancer.
Et aussi parce que, à titre personnel, je crois plus important de faire en sorte que les socialistes pèsent le plus possible pour faire progresser l’Union européenne dans les prochaines années, que d’adresser aujourd’hui un message – légitime ! - à l’actuelle direction du PS.
Enfin, parce que même si je regrette les erreurs du Congrès de Reims et la façon dont il s’est réglé (les tensions suscitées par les listes proposées sont le prolongement et la conséquence directs), aujourd’hui il nous faut bien l’assumer collectivement. Pourvu que cela renforce notre détermination à ne pas faire les mêmes erreurs lors du prochain congrès ! Cela dépendra avant tout de nous, et d'ores et déjà cela dépend de notre façon de militer dans nos sections, comme je l'ai écrit au lendemain du Congrès de Reims.

Mais qu’on ne compte pas sur moi pour faire la leçon (ou y participer !) à ceux de nos camarades qui diront « non » à ces listes, ou choisiront de voter blanc ou de s’abstenir !
Je comprends ceux, parmi nos camarades, qui ce soir rejetteront la prévalence des logiques de "courants" ; ou estimeront que l’on ne va pas encore assez loin dans l’exigence du non-cumul.
Ayant proposé, quand nous préparions notre nouvelle « Déclaration de principes », d’y inscrire noir sur blanc la pratique effective du non-cumul, nous nous retrouverons chaque fois qu’il s’agira de faire avancer cette pratique – passage obligé pour donner à notre famille politique et à son projet tout leur pouvoir-vivre !

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